Les conservateurs de Stephen Harper devraient chercher à répondre aux besoins de la population d’Attawapiskat au lieu d’épier les faits et gestes d’une grande défenseure du bien-être des enfants

TORONTO – Il est inquiétant de constater que le comportement irréfléchi auquel se livrent les conservateurs de Stephen Harper en épiant les faits et gestes de Mme Cindy Blackstock, qui est défenseure du bien-être des enfants, directrice générale de la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations (SSEFPN) du Canada et partenaire des TUAC Canada en milieu communautaire à l’échelle nationale, rappelle ce que faisait le sénateur Joseph McCarthy au cours des années 1950. En effet, lors de la Grande Peur des rouges (ou communistes), ce dernier terrorisait la population des États-Unis et en profitait pour donner froid dans le dos à celles et à ceux qui se portaient à la défense de la dignité et des droits fondamentaux de la personne.

Mme Blackstock, professeure universitaire qui consacre sa vie à lutter pour que les enfants autochtones bénéficient de l’égalité des chances, serait fichée par le gouvernement fédéral dans une « liste de surveillance des défenseures et défenseurs des droits de la personne ». Elle affirme elle-même s’être rendu compte, il y a quelques semaines, que le ministère des Affaires autochtones la surveillait de la sorte depuis 2007. Entre autres documents qu’elle a réussi à se procurer auprès de ce dernier, elle a obtenu la copie de messages de courrier électronique, de notes de service, d’éléments d’un dossier de surveillance, d’une fiche de renseignements personnels, de notes d’information négatives et d’autres pièces de renseignement pertinentes. Voilà comment elle s’est informée sur le travail d’agents du gouvernement qui suivaient systématiquement de près ses activités ainsi que les déplacements au cours desquels elle prononçait des discours. Ces agents assistaient donc aux conférences avant d’aller présenter leur rapport à leurs supérieurs. C’est également en étudiant toute cette documentation que Mme Blackstock a appris qu’un bureaucrate du gouvernement s’était rendu à sa page en Facebook pour en faire une capture à l’écran et, ensuite, en inscrire le contenu dans des registres gouvernementaux.

Même si le gouvernement fédéral tente constamment de la surveiller en secret, Mme Cindy Blackstock n’en démord pas : elle continuera toujours à lutter afin de faire respecter les droits des enfants autochtones.

« Les documents internes du gouvernement canadien confirmeraient que c’est précisément à cause de l’insuffisance du financement des programmes devant assurer le bien-être des enfants des Premières Nations qu’un certain nombre de ces enfants seraient placés chez des familles d’accueil sans nécessité », affirme Mme Blackstock. « Il faut que le Canada fasse tout ce qui est en son pouvoir pour veiller à la satisfaction des besoins des enfants au lieu de gaspiller l’argent des contribuables en faisant épier celles et ceux d’entre nous qui élèvent la voix pour manifester une inquiétude tout à fait justifiée en ce qui a trait aux droits de ces mêmes enfants. Le scandale des abominables abus sexuels commis à l’Université d’État de la Pennsylvanie, qui a éclaté le mois dernier, devrait nous rappeler à toutes et à tous à quel point il est important que les adultes parlent au nom des enfants vulnérables », précise-t-elle encore.

En 2007, l’Assemblée des Premières Nations et la SSEFPN ont fait une intervention historique en signifiant devant la Commission canadienne des droits de la personne que le gouvernement canadien devait répondre de la façon déplorable dont il traitait les enfants des Premières Nations. En exerçant leur action auprès de cette institution, elles ont expliqué que ce dernier avait depuis longtemps pour habitude d’accorder moins de ressources au bien-être des enfants des Premières Nations vivant dans les réserves qu’à celui des enfants non autochtones.  

« Sous les conservateurs, le gouvernement fédéral tombe plus bas que jamais en prenant pour cible Mme Cindy Blackstock. De plus, c’est bel et bien avec préméditation qu’il ose surveiller ainsi une personne se portant à la défense des droits de la personne alors que la population d’une réserve ou localité autochtone sur six, comme celle d’Attawapiskat, vit dans une situation désespérée à cause des dispositions gouvernementales, qui ont pour effet de la marginaliser et consistent à la spolier depuis de nombreuses décennies », soutient le président national des TUAC Canada Wayne Hanley. « Le Canada étant un pays qui dispose de moyens à profusion, nos membres savent très bien que le gouvernement fédéral ferait mieux de se servir de ceux dont il pourrait user en collaborant avec les communautés autochtones dans le but de vaincre la misère sévissant dans les réserves aux quatre coins du pays au lieu d’éparpiller futilement ses forces en passant son temps à suivre partout à la trace une consœur qui ne fait que tenter de contribuer à protéger notre héritage le plus précieux, c’est-à-dire nos enfants. »

La Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nationsest un partenaire du milieu communautaire qui, sur la scène nationale, est associé aux TUAC Canada, le plus grand syndicat du secteur privé au pays. L’organisation syndicale s’est justement engagée à soutenir la SSEFPN et ses œuvres, soit le principe de Jordan, le rêve de Shannen, l’initiative qui a pour titre Je suis un témoin et les Pierres de touche de l’espoir. En avril 2011, à Winnipeg, Mme Blackstock a rencontré des délégués nationaux faisant partie du Comité des droits de la personne, de l’équité et de la diversité des TUAC Canada pour les éclairer sur le traitement des enfants autochtones dans tout le pays ainsi que sur le soutien qu’on néglige de leur accorder. On allait ensuite rendre compte de cette rencontre aux présidentes et aux présidents de toutes les sections locales des TUAC Canada.

« La stratégie du gouvernement de Stephen Harper est claire : elle consiste à faire comprendre à toute personne prenant la défense des droits des enfants des Premières Nations qu’elle se retrouvera dans le collimateur du gouvernement canadien. Or, pendant ce temps, c’est tout à fait sans scrupule que celui-ci ferme les yeux sur les forces structurantes qui font obstacle aux enfants des Premières Nations et qu’il a recours à la désinformation en faisant état de l’appui financier qu’on aurait déjà assuré à la collectivité d’Attawapiskat uniquement afin que la population ne s’aperçoive pas de l’échec de ses politiques. Le gouvernement conservateur refuse toujours de travailler en collaboration avec les personnes qui, comme Cindy Blackstock, viennent en aide aux enfants vivant dans des localités ou des réserves comme celle d’Attawapiskat ; s’il le faisait, il apprendrait, grâce à l’expérience, ce qu’il faut faire pour se mettre à l’œuvre dans leur intérêt », fait valoir le directeur du Service des droits de la personne, de l’équité et de la diversité des TUAC Canada Naveen Mehta. « La stratégie de la guerre froide, que le gouvernement fédéral emploie au détriment des peuples autochtones et de leurs enfants depuis une époque assez lointaine, se manifeste par l’exercice de la surveillance de personnes qui, à l’instar de Mme Blackstock, s’efforcent de faire en sorte que le gouvernement réponde de la façon dont il agit. Or, cette pratique d’espionnage tient d’une mentalité totalement périmée. C’est une atteinte de fond à nos valeurs démocratiques et un abus de l’argent des contribuables. Il faut que le gouvernement conservateur cesse immédiatement de négliger les enfants des Premières Nations, qui sont parmi les plus vulnérables de notre pays. »