Blogue politique : Le Canada doit inclure les femmes dans le programme de redressement de l’économie après la crise de la COVID 19

Toronto – 27 août 2020 – La pandémie de COVID‑19 a été pénible pour les travailleurs, les travailleuses et les familles dans tout le pays, mais à bien des égards, ce sont les femmes qui ont subi le plus gros des répercussions économiques de la pandémie.

Un rapport de juillet de la Banque Royale du Canada (RBC) a révélé que le Canada a été secoué par une récession sans précédent. La récession se caractérise non seulement par l’ampleur des dommages qu’elle a infligés à l’économie canadienne, mais aussi par le coup qu’elle a porté aux femmes. En quelques mois seulement, la pandémie de COVID‑19 a fait chuter la participation des femmes à la population active d’un sommet quasi historique à son niveau le plus bas depuis plus de 30 ans. De mars à juin, le taux de chômage des femmes a dépassé celui des hommes pour la première fois depuis plus de trois décennies. Et l’emploi des femmes, qui est dominant dans les secteurs les plus touchés par la récession, a été plus lent à rebondir avec la reprise de l’économie.

Au début du mois d’août, 4,7 millions de Canadien(ne)s recevaient la Prestation canadienne d’urgence (PCU). De ce nombre, 1,4 million est admissible à l’assurance-emploi (AE) en vertu des règles actuelles, et bon nombre d’entre eux et elles recevraient moins de 500 $ par semaine. Les bas salaires et les personnes, dont la majorité est des femmes, travaillant dans des secteurs fortement touchés par la pandémie, tels que l’hôtellerie, les arts, le commerce de détail et les compagnies aériennes, seront les plus touchés. De plus, 57 % des bénéficiaires de la PCU qui risquent de ne pas être admissibles à l’assurance-emploi sont des femmes. Le gouvernement a annoncé que la PCU prendra fin et sera remplacée par plusieurs programmes, dont l’assurance-emploi améliorée, mais ces changements sont temporaires, et dans la plupart des cas, les bénéficiaires recevront moins d’argent.

Alors que les gouvernements continuent de relancer l’économie, le sort des femmes doit être au premier plan de leurs préoccupations si nous voulons que la reprise profite à tous et toutes les Canadien(ne)s. L’une des priorités centrales pour un bon rétablissement de l’économie est la garde des enfants. En effet, la garde des enfants a toujours été un problème qui touche les femmes de manière disproportionnée, car ce sont elles qui assument en grande partie ces responsabilités à la maison. Un projet de relance qui n’aborde pas sérieusement les questions relatives à la garde des enfants abandonnera beaucoup trop de femmes.

Depuis des décennies, les femmes nous disent que la garde des enfants est essentielle. Mais le prix élevé des garderies a toujours été l’un des plus grands obstacles à la mise en place d’un système de garde d’enfants abordable et accessible, et il représente aujourd’hui le deuxième coût le plus important pour les parents après le logement. Parfois, la garde d’enfants est encore plus coûteuse qu’une hypothèque. Les familles de Toronto peuvent payer jusqu’à 21 000 $ par an pour un nourrisson, ou 14 500 $ par an pour un jeune enfant, et de nombreuses familles paient beaucoup plus. Le manque de places disponibles dans les garderies constitue un autre défi. À Toronto, l’année dernière, il y avait 109 105 enfants de moins de quatre ans, mais seulement 46 050 places de garderie agréées pour ce groupe d’âge.

La COVID‑19 a aggravé les problèmes de garde d’enfants. Avec la réouverture des entreprises, les prestataires de services de garde d’enfants réduisent leurs capacités en raison des mesures d’éloignement physique. Comme les écoles sont sur le point de rouvrir, les parents craignent pour la sécurité de leurs enfants. Il se peut que les femmes ne puissent pas retourner au travail parce qu’elles assument davantage de responsabilités en matière de garde d’enfants et qu’elles devront refuser de travailler si la question de la garde des enfants n’est pas abordée par les gouvernements.

Une motion fédérale du NPD a été adoptée à la Chambre des communes, avec le soutien du gouvernement libéral, pour un investissement immédiat de 2,5 milliards de dollars dans les services de garde d’enfants, afin de stabiliser l’industrie et d’aider à subventionner les prestataires qui se conforment aux directives de la santé publique. Toutefois, il faut en faire plus si nous voulons vraiment aider les parents.

Depuis plus de 20 ans, les libéraux promettent un système universel de garde d’enfants, mais leurs promesses n’ont jamais été suivies d’effet. Ce n’est pas le moment de faire d’autres promesses, il faut agir de toute urgence. Il est temps de mettre en place un système universel de garde d’enfants qui apporte l’aide dont les familles ont besoin. Au-delà de l’investissement immédiat de 2,5 milliards de dollars, le gouvernement doit investir 10 milliards de dollars supplémentaires au cours des quatre prochaines années. Cela permettra de financer 500 000 places de garde d’enfants publiques et agréées, à un prix abordable, et pourrait aboutir à un système qui coûte 10 $ par jour aux parents.

Le gouvernement néo-démocrate de John Horgan en Colombie-Britannique a mis en place un programme pilote qui suit ce modèle, et les parents ont déclaré que cela améliorait considérablement leur vie. Ils paient 10 $ par enfant par jour, ou moins pour une garde à temps plein. Cela ne représente que 200 dollars par mois; un changement radical par rapport au coût médian mensuel de 1 360 dollars pour la garde d’enfants à Vancouver, et le programme permet aux familles d’économiser jusqu’à 15 000 dollars par enfant et par an. Pour certaines familles, la différence est considérable : leurs cartes de crédit ne sont pas plafonnées chaque mois, elles peuvent acheter des aliments nutritifs et ont désormais accès à un meilleur logement.

À long terme, le gouvernement doit également adopter une loi pour entériner l’engagement en faveur de services de garde d’enfants de qualité, abordables et financés par l’État, et définir les principes, les conditions et les exigences des paiements de transfert fédéraux aux provinces. Des études montrent que des services de garde d’enfants abordables contribuent à l’économie. Au Québec, pour chaque dollar dépensé par le gouvernement pour la garde d’enfants, l’économie bénéficie d’un rendement de 1,50 $. Non seulement le programme est autofinancé, mais il est aussi rentable.

Les femmes représentent environ la moitié de la main-d’œuvre canadienne, et nous ne pouvons pas nous permettre de les perdre. C’est très simple. Il ne peut y avoir de récupération après la COVID‑19 sans que les femmes se réadaptent complètement, et elles ne peuvent pas se réadapter sans avoir accès à des services de garde d’enfants. Des services de garde d’enfants abordables et accessibles sont et continueront d’être essentiels pour relancer notre économie.